Joyeusement pendus autour du livre !

À l’occasion de la fête du livre, pour la première fois, le village des éditeurs stéphanois sera situé place Dorian. L’occasion de discuter avec l’écrivain Pascal Pacaly des éditions des Joyeux Pendus qu’il co-gère bénévolement. Discutons donc autour de cet objet « synonyme de culture et d’ouverture d’esprit » et qui résiste encore et toujours au temps qui passe : le livre…

Tu t’occupes d’une maison d’édition stéphanoise, Les Joyeux Pendus. Quelques mots.

Nous sommes plusieurs bénévoles dont l’amour du livre et de la culture est plus qu’important : nécessaire, encore plus dans une société comme la nôtre, ou hélas, injustement, on tire la culture vers le bas . Il faut donc transmettre, encore et encore, l’Histoire, la grande, mais aussi la locale. Il y a également de plus en plus de violence dans cette société. Sans doute est-ce lié à plusieurs facteurs comme l’immédiateté des réseaux sociaux et le manque de recul qui en résulte. Or, avec le savoir, avec les livres, on peut mieux avoir une vue d’ensemble, prendre le temps, ouvrir son esprit, comprendre que les fils qui nous relient tous sont plus proches que lointains et que toute cette frénésie n’a pas lieu d’être. Mais oui il faut prendre beaucoup de recul et de temps. Le nom de Joyeux Pendus fait référence à la salle des Pendus de la mine, clin d’œil à notre amour de la ville.

Tes différents ouvrages abordent le foot, le rock… mais en trame de fond, tu parles des gens, de leur histoire, petite et grande. Pourquoi ?

Parce qu’à Saint-Étienne, le foot est plus qu’un sport : mais pour le comprendre il faut sortir des clichés que les médias véhiculent. Bien sûr il y a beaucoup d’argent dans le foot, mais est-ce le seul domaine où l’argent coule à flots ? On tape sur le foot par facilité. C’est dommage, car lorsque l’on va en profondeur on y trouve de très belles choses : cette solidarité entre des gens qui se retrouvent dans un stade ou dans un bar et refont le monde. On se fout de la politique ou de la religion quand on regarde un match de foot. L’histoire des gens est intéressante car quand on interroge un ancien joueur des années 60 comme Aimé Jacquet ou les Verts de 76 on voit l’évolution non seulement du football mais aussi de la ville, des supporters. Encore une fois, apprendre, c’est mieux comprendre, et mieux comprendre c’est grandir plus sereinement et avec plus de confiance en l’autre.

Le livre est toujours là malgré les assauts du digital, tu en penses quoi (évolution, usages, )… 

Chez les Joyeux Pendus, nous refusons le digital. Sans doute parce que nous sommes des vieux cons ! Mais pour nous un livre c’est un papier, une odeur, c’est pouvoir le plier et le mettre dans la poche de ta veste ou de ton pantalon… C’est aussi la nostalgie d’une époque, c’est sûr. Toutefois, nombreux sont les gens qui aiment sentir l’odeur d’un livre et c’est un lien qui nous rattache à la lecture : je vois mal les gens sentir leur tablette… Après, oui, on peut aussi dire qu’il faut vivre avec son temps et que le digital permet l’accès à tous. Mais que ce soit en papier ou digital, ce même accès est toujours possible. On est donc plus dans une vision de la vie, dans une temporalité, une époque. Après, ce qui compte au final, c’est que le savoir continue d’être transmis.

C’est comment la vie d’un écrivain et d’un éditeur indépendant ?

Comme toujours tout dépend de ton chiffre de ventes, forcément. L’argent ne fait pas le bonheur mais il peut y contribuer. Aux Joyeux Pendus nous ne faisons pas cela pour l’argent – même si bien entendu nous n’avons rien contre ! – mais plus par tentative de s’élever tous ensemble dans la société. L’argent peut être un frein car évidemment plus tu fais de publicité dans les médias plus on entendra parler de ton livre, mais la publicité coûte parfois cher. La difficulté se situe ici à arriver à se faire connaître nationalement. L’avantage ? Il n’y en a pas vraiment… peut-être un plus grand choix au niveau éditorial, mais ce choix peut vite s’avérer cornélien. Par exemple, on peut partir sur un livre complètement barré, qu’on adore, mais dont on sait qu’il va générer peu de ventes. S’il y a peu de ventes, il y a donc peu de rentrées d’argent au sein de l’association et ainsi moins la possibilité de publier d’autres auteurs. Donc, comme on le voit l’avantage d’une certaine liberté d’action peut vite se retourner contre soi. Il faut toujours penser, au final, à avoir un perpétuel équilibre budgétaire, car le but est de publier le plus d’auteurs possible.

Quels sont les ouvrages que tu présenteras à la Fête du livre ?

Nos ouvrages « locaux » sur les anciens mineurs stéphanois, « Gueules Noires de Sainté et d’ailleurs » ceux sur l’ASSE des années 60 à aujourd’hui, les deux tomes de « La Vie en Vert », des polars, de la poésie, du rock, de la sociologie ! À noter la présence d’Olivier Gardon sous le grand chapiteau – les éditions, elles, seront place Dorian au village des éditeurs stéphanois – en dédicace de son livre « Au Service de votre folie » racontant l’univers psychiatrique dans sa diversité : c’est une immersion dans son travail. On y trouve la vie auprès des patients comme du personnel médical, des parents aussi. C’est rempli d’anecdotes sur la gestion de la maladie mais aussi de la violence parfois, sans oublier quelques histoires d’amour. C’est vraiment le reflet de notre société, de notre époque.

Justement, que penses-tu de l’installation des éditeurs stéphanois place Dorian ?

Que c’est une très bonne chose. Depuis quelques années les choses vont dans le bon sens avec la municipalité et tout le monde ne peut que s’en féliciter. Il n’y avait jadis, que très peu de place pour les éditeurs stéphanois. Or les éditeurs locaux sont stéphanois, aiment leur ville et la représentent. Nous faisons passer des messages, nous rencontrons la population, nous sommes des acteurs actifs de la ville. En allant place Dorian, nous nous rapprochons géographiquement et peut-être « psychologiquement » du grand chapiteau. Comme toujours, l’union fait la force.

Site web : https://leseditionsdujoyeuxpendu.com/ouvrages/