Inutile de présenter le Festival des Arts Burlesques créé par le Nouveau Théâtre Beaulieu, placé sous la direction de Michel Mazziotta : un festival d’humour qui propose une programmation prestigieuse que nous envient bien d’autres villes. Nous avons concocté une interview « Comment faites-vous ? » à son directeur, Michel Mazziotta. Rencontre :

Michel Mazziotta, comment faites-vous pour proposer une programmation aussi riche et aussi pertinente ?
Merci du compliment : nous sommes parmi les premiers en France à proposer un tel plateau, c’est vrai… 35 ans de carrière m’ont permis de tisser des liens avec le monde de la scène, mais je concerte beaucoup l’équipe qui m’entoure et les associations qui nous accompagnent.

Michel Mazziotta, comment faites-vous pour convaincre Stéphane Rousseau d’élire « résidence » à Saint-Étienne pour son nouveau spectacle « I live you » ?
Cette résidence prestigieuse consacre notre travail avec la société Juste pour Rire qui produit Stéphane Rousseau, et je connais bien la famille Rozon qui la dirige.

Michel Mazziotta, comment faites-vous pour convaincre Kev Adams, l’idole de toutes les collégiennes (et de certaines lycéennes) , de venir à Saint-Étienne ?
Le rôle d’un festival, c’est aussi de faire venir des artistes en devenir. Rappelez-vous, nous avons notamment participé à la découverte de Florence Foresti… Pour sa part, Claudia Tagbo a obtenu le prix du Jury et Virginie Hocq le grand Prix. À une époque, Kev Adams a eu besoin lui aussi d’un coup de pouce et aujourd’hui il nous renvoit la balle, en quelque sorte. Il sera bientôt au Zénith pour la suite de sa carrière.

Michel Mazziotta, comment faites-vous pour réunir autour de vous une équipe aussi  investie ?
Ce qu’on appelle communément « l’exception culturelle » concerne aussi les pratiques amateurs et le bénévolat. Nous sommes dans la démocratie de participation et les bénévoles deviennent des citoyens actifs et responsables en œuvrant à nos côtés. Quant aux salariés, trop peu nombreux pour mener à bien le projet, ils s’impliquent car c’est l’intérêt de tous. Le secret, au fond ? De la bienveillance et de l’implication environ 45 heures par semaine… Quand je rentre le soir, la journée n’est pas finie car je dois encore répondre à des mails…

Michel Mazziotta, comment faites-vous pour convaincre autant de partenaires privés pour soutenir vos actions ?
C’est une entreprise réellement compliquée, mais c’est sans doute « parce qu’on le vaut bien » ! Le partenariat privé représente 17 % de notre chiffre d’affaires. Le problème est que je n’ai pas de personnel spécialement dédié aux entreprises, du coup, c’est toute l’équipe qui s’implique.

Michel Mazziotta, comment faites-vous pour ne pas inviter Anne Roumanoff cette année ?
J’ai dû faire venir Anne Roumanoff plus d’une vingtaine de fois déjà, 7 fois ici et 13 fois ailleurs… Donc cette histoire, c’est sûr, crée des liens mais il faut aussi savoir renouveler une programmation. J’en profite pour donner un grand coup de chapeau à Anne qui nous a permis financièrement de faire monter le festival en puissance et avec notamment les « Chéris d’Anne » qui nous ont fait connaître des jeunes talents.

Michel Mazziotta, comment faites-vous pour organiser autant de spectacles, accueillir autant de public et impliquer autant de partenaires différents avec un budget, au final, aussi serré ?
Je ne vous cache pas que notre tâche est plus que délicate, c’est vrai… Nous avons accueilli en moyenne 32 000 spectateurs pour 120 levers de rideaux par an en comptant les spectacles accueillis. Mais honnêtement, je ne sais plus trop combien de temps cela sera encore possible. Nous sommes le seul festival en Rhône-Alpes, à ma connaissance, à présenter 47 % d’autofinancement dans le budget, la moyenne nationale se situant, selon une étude SNSP 2008, à 11 %…

Michel Mazziotta, comment faites-vous, après le Festival des Arts Burlesques, pour organiser un festival d’été « Bô Mélange » dont la programmation s’annonce toute aussi intéressante ?
Je dois rappeler que j’ai dirigé en 1980 le mois du Jazz à Vienne, sorte d’embryon de ce qu’est devenu le fameux Jazz à Vienne et dont j’ai fait partie du bureau en 1981. Puis en Bretagne, j’ai également développé des actions Jazz et Musiques du monde. J’ai donc gardé quelques attaches, ceci explique sans doute cela…

Michel Mazziotta, comment faites-vous pour ne pas prendre la grosse tête ?
Lorsqu’en 2003 la ville de Saint Étienne souhaitait développer un projet culturel dans les quartiers sud, cela m’avait beaucoup intéressé… J’avais lu des articles de Richard Florida concernant le désenclavement culturel. J’ai refusé un poste de scène nationale pour débarquer dans une MJC où la salle de spectacle était cassée et fermée. Parallèlement, j’ai développé des actions dites socio-éducatives dans le cadre de la politique de la ville. À l’époque, je ne savais pas ce à quoi m’attellerait un tel projet innovant et créatif. L’humilité est la condition de la réussite.

Michel Mazziotta, comment faut-il faire pour monter un plan avec Bérangère Krief ou Christelle Cholet (ou les deux !) ?
Vous l’aurez remarqué et je le constate aussi (!) que j’attache beaucoup d’importance à programmer des artistes femmes, aussi bien dans les domaines comiques ou burlesques, ce fut plutôt difficile par le passé, moins maintenant… Mais nous n’arrivons pas encore à la parité (qui n’est d’ailleurs pas encore obligatoire dans nos métiers). Ensuite, programmer Christelle Cholet et Bérangère Krief, c’est le résultat de très bonnes relations avec les productions. De plus, la ville de Veauche avait déjà accueilli Christelle Cholet, ce qui nous facilita la tâche…