Le Verso a une histoire forte avec Saint-Etienne. Fondé en 2002, il a permis depuis ses origines à bon nombre de compagnies et d’artistes d’avoir une scène, un lieu de création et de représentation. Sa nouvelle saison est lancée. Particularité cette année, elle voit Gilles Granouillet, son directeur historique, transmettre le relais à Marjorie Lurol. Elle est épaulée par Marion Valeyre, mais aussi Jason Curcio et Sandrine Triquet. Marion et Marjorie répondent à nos questions, histoire de nous parler de leur projet et de cette saison « qui déplace les bornes ».
Le Verso entame sa nouvelle saison culturelle avec cette année deux changements importants. Le premier concerne la direction, puisqu’une nouvelle équipe artistique succède à Gilles Granouillet. Dans quel état d’esprit êtes-vous ?
Marjorie : nous sommes prêtes et prêts. C’est un peu plus d’un an de travail qui aboutit. Il a fallu penser à la fois le futur du Théâtre Le Verso et le futur de la Compagnie Travelling Théâtre. Maintenant, il n’y a plus qu’à se lancer. Gilles Granouillet a eu le souhait de me transmettre la direction du théâtre afin que je continue, avec l’équipe, de faire vivre ce lieu essentiel au paysage stéphanois. Nous nous devons donc de faire perdurer certaines ambitions et d’en faire émerger d’autres, dans le respect de l’identité du Verso. Nous faisons le choix de ne pas prendre une équipe artistique permanente, mais de s’associer à une compagnie locale, sur deux saisons consécutives. L’objectif étant d’aller vers des projets artistiques de territoire en mêlant les envies du théâtre et celles des compagnies.
Marion : Oui, l’équipe est sereine.
Je pense que nous sommes surtout galvanisés par ce futur de plus en plus proche. Notre saison 2024-2025 nous ravit et amorce déjà les nouvelles perspectives, c’est un vrai moteur d’optimisme… Avec la Compagnie Travelling Théâtre, on ne se quitte pas pour toujours et c’est bien ça le plus beau, Le Verso accueillera et coproduira les futures créations de la compagnie avec beaucoup de plaisir !
Le deuxième concerne la séparation symbolique d’avec le Chok Théâtre. La Ruelle, la saison commune historique, laisse place à deux saisons distinctes. Quelques mots ?
Marion : plutôt que de parler de séparation, je parlerais d’évolution. La Ruelle existe et existera, nous avons d’ailleurs eu à cœur de garder cet en-tête sur nos plaquettes respectives, « LA RUELLE ». Cette décision n’a pas été simple, mais deux raisons nous ont incitées à la prendre. La première, c’est qu’un programme commun est une force et parfois une faiblesse. Nous sommes totalement indépendants dans nos programmations et nos fonctionnements, nous n’avons donc pas toujours les mêmes partenaires et les mêmes objectifs. Il était compliqué d’expliquer au public qu’un théâtre sur deux travaillait avec tel ou tel partenaire, ou avait tel ou tel projet, alors que l’autre théâtre non et inversement. Cela devenait soit brouillon, soit bloquant pour maintenir l’équité à l’intérieur d’un seul support.
La deuxième, c’est que les deux théâtres ont ressenti le besoin d’affirmer leurs identités. Du côté du Théâtre Le Verso, c’était surtout l’occasion de mettre des mots sur notre fonctionnement et nos valeurs, de parler des compagnies et des publics qui viennent à notre rencontre. On a parlé de nous dans cette plaquette, nos actions, nos valeurs, notre éthique, nos projets… Nous ferons perdurer cette transparence saison après saison… Nous proposons également un nouveau sens de lecture dans notre plaquette ! Avec des ponts entre les spectacles et une belle visibilité pour les « événements de saison » qui sont une de nos nouveautés, propre au Théâtre Le Verso.
Marjorie : La nouveauté amène la nouveauté, le lieu amorce un virage et nous devions marquer cela par des changements. Une plaquette individuelle et une saison complète. Nous avons mis l’accent sur notre ADN, c’est-à-dire la convivialité, l’ouverture et la volonté de faire avec et pour les habitants. Nous avons également pensé à ceux qui ne nous connaissaient pas, qui ne côtoient pas encore La Ruelle. Au Théâtre Le Verso, il y a des spectacles tout jeunement créés avec des compagnies pleines d’énergie qui ont beaucoup à dire. Nous avons depuis toujours l’ambition de faire du Théâtre Le Verso un lieu de curiosité, un laboratoire ou chacun et chacune a sa place avec des propositions artistiques de grande qualité. Le verbaliser était devenu pour nous essentiel.
Quelles vont être les principales missions ou défis du Verso pour cette nouvelle année ?
Marjorie : Les défis sont multiples. Il y a la saison 2024-2025 à mener avec plusieurs compagnies qui viendront en résidence créer leurs spectacles, il y a aussi les projets qui sont moins visibles comme le Prix Kamari mené avec plusieurs établissements scolaires du territoire, des ateliers amateurs en lien avec les spectacles de la saison… Et au milieu de toute cette effervescence, il y a le futur à construire, la saison 2025-2026 sera la première saison du Théâtre Le Verso comme seule entité, elle sera importante pour marquer le renouveau. Il faudra donc que nous nous accordions le temps de construire et mettre les priorités sur nos multiples envies. Ce que je peux vous dire pour la suite, c’est que Le Verso va conserver ses axes de travail : l’accompagnement des compagnies professionnelles, l’aide à la création et la diffusion et la mise en place d’actions d’éducation artistique et culturelle auprès d’un public le plus large possible. Le Verso souhaite entrer en résonance avec la notion de droits culturels et penser un lieu et une programmation plus ouverte, plus participative et interactive, penser des projets pour aller à la rencontre de notre territoire et des diversités qui le compose, mettre en avant des singularités. Et comme depuis toujours, défendre la qualité artistique des projets que nous accompagnons.
Histoire de nous faire envie, pouvez-vous nous citer quelques événements à ne pas manquer ?
Marion : Avec plaisir, je vais simplement essayer de ne pas citer toute notre programmation au complet ! Il y a d’abord trois temps » cadeaux » qui ont été pensés avant le départ de la Compagnie Travelling Théâtre sur les routes ! Deux lectures, l’une d’un texte sublime de Gilles Granouillet qui sera mise en voix par les étudiants de la Comédie de Saint-Etienne « Les anges de Massillia » le vendredi 11 octobre à 20h, l’autre celle du texte de la prochaine création 2026 « Un Mariage », le 6 décembre à 18h. En décembre également, les 19 et 20, nous accueillerons la Compagnie Paradoxe(s) avec le spectacle « ZOOM » écrit par Gilles Granouillet. Je pourrais également vous dire que notre programmation regorge de spectacles à venir voir en famille, comme Le mystère Léon Plouhinec de la Cie les étourneaux les 19, 21 et 22 janvier. Je ne peux passer à côté de l’envie de vous parler aussi de ces magnifiques créations qui vont voir le jour dans notre théâtre, Cytotec, Kant, Masculinité.e.s ? et aussi de nos temps forts « Croquer la mort à pleines dents » qui comprend deux spectacles nous invitant à penser la mort entre bons vivants. Il y a aussi « Un cortège à Saint-François », un des plus gros événements de notre saison. C’est un magnifique partenariat avec le Méliès Saint-François, proposant un parcours entre nos deux salles, avec de la convivialité, de l’agitation citoyenne, du théâtre, un documentaire… Il y a tellement de ponctuation dans cette belle saison, le mieux étant de vous inciter à être curieux et curieuses… Et d’aller voir sur notre site internet www.travellingtheatre.fr ou encore sur nos réseaux / @theatreleverso.
Marjorie : j’invite également les curieux et curieuses à se tenir informé de nos activités. Rien n’est figé au Théâtre Le Verso, des temps de rencontre comme des sorties de résidences peuvent être proposés au fil de la saison.
Un mot pour conclure ?
Marion : J’aurais envie de redire cette phrase ajoutée sur notre plaquette en dessous du nom du Théâtre Le Verso » Un lieu qui déplace les bornes « . Outre le fait que les jeux de mots sont nos dadas, je dirais que cette phrase est aux racines de ce qui a fait naître notre théâtre et de ce qui le fait aller vers l’avenir. Elle parle de notre équipe, des compagnies et du public qui anime ce lieu. Toutes les disciplines ont foulé les planches du Verso, et on aime les voir se marier parfois le temps d’un spectacle. On ne dépasse pas les bornes, nous les élargissons pour faire de la place à toutes et tous. Je rebondirai sur l’édito de Gilles Granouillet qui se trouve dans notre plaquette de saison, notre travail au quotidien est d’ouvrir nos portes à celles et ceux qui travaillent chaque jour à nous faire rêver, rire et nous émouvoir, ouvrir la porte aussi à des publics mouvants. Car Le Verso, est un théâtre de rencontres multi-facettes pour les audacieux et audacieuses.
